Juriste, Conseiller en promotion du genre au ministère en charge de l’action humanitaire, écrivaine et médiatrice professionnelle, Léonie Ouangaraxa Koudougou est une femme dont le leadership n’est plus à démontrer. Le vendredi 24 octobre 2025, elle a soutenu sur la médiation professionnelle au Burkina Faso. En effet, elle a passé au peigne fin, les limites et les avantages de cette pratique, défendant avec brio son mémoire de master. Aux termes de la soutenance, le jury lui a attribué la note de 17/20. Regards croisés sur une dame au parcours inspirant!
Parlez-nous de votre parcours académique et professionnel !
Sur le plan académique, je suis titulaire d’un Master II en médiation-conflits et culture de la paix à Swiss Umef University of Burkina Faso basée à Ouagadougou. J’ai aussi une maîtrise en sciences juridiques et politiques, option droit judiciaire obtenue à l’oniversité Ouaga 1, Pr Joseph Ki-ZERBO. En plus, j’ai un certificat sur Femmes, Paix et Sécurité (FPS) obtenu à l’université Senghor d’Alexandrie en Égypte et un certificat sur l’Égalité Femme/Homme (EFH) obtenu à l’Institut de la Francophonie pour l’Éducation et la Formation (IFEF) basé à Dakar.
Sur le plan professionnel, je suis titulaire d’un diplôme de conseiller en promotion du genre. J’ai assumé les fonctions de chargée d’études et de Directrice de l’Inclusion de la Femme aux Actions de Paix et de Sécurité au sein du ministère en charge du genre.
Fervente défenseure des droits de la femme et de la jeune fille, j’ai à mon actif, deux ouvrages. Le premier intitulé « La commémoration de la journée internationale des femmes (08 mars) au Burkina Faso, qu’en est-il en réalité ? » et le second intitulé : « Violences faites aux femmes et aux filles au Burkina Faso : réalités et stratégies de lutte ».
Je suis également enseignante dans les instituts et écoles de la place dans les domaines du genre, des Violences basées sur le Genre (VBG) et du leadership féminin.
J’interviens, par ailleurs, en tant que formatrice et coach des acteurs de développement en matière de promotion et de protection des droits de la femme et de la jeune fille.
Je réalise des émissions radio et télé, des panels nationaux et régionaux sur les thématiques en lien avec le genre, les droits de la femme et les VBG.
Je suis enfin, médiatrice professionnelle et j’interviens dans la prévention et la gestion des conflits, notamment par la médiation.
Qu’est-ce qui vous a motivée, à vous lancer dans l’écriture ?
Les raisons qui m’ont motivée à me lancer dans l’écriture sont de plusieurs ordres :
D’abord, j’écris pour informer, former, sensibiliser et éveiller la conscience des populations sur les aspects de la thématique faisant l’objet de mon écriture. Mes ouvrages servent aussi de documents pédagogiques pour les acteurs-terrain.
Ensuite, pour mettre en lumière aux yeux de la population, ce que je fais et rencontre au quotidien dans le cadre de l’exercice de ma profession.
En outre, j’écris pour la postérité, d’autant plus que très souvent, de belles actions sont posées dans les services publics et privés par les différents acteurs. Mais, elles disparaissent avec le temps sans qu’on ne puisse retrouver des traces. Ces ouvrages permettront aux générations futures de s’informer et de s’approprier les actions posées, de par le passé.
De quoi parle votre première œuvre ?
Ma 1ère œuvre parle de la réalité de la commémoration de la journée internationale des femmes (08 mars) au Burkina Faso.
La commémoration de la Journée Internationale des Femmes est l’occasion pour le monde entier de marquer un temps d’arrêt pour réfléchir sur la situation et les conditions de vie des femmes, sur leur rôle et leur place dans la société, et de prendre des engagements en leur faveur.
A travers la célébration du 08 mars, les femmes ont voulu une journée de réflexion et d’action en vue de faire le bilan des actions déjà menées et surtout de s’engager à poursuivre la lutte pour non seulement, consolider les acquis ; Mais aussi pour relever les défis.
Cependant, force est de reconnaître que les informations et messages régulièrement véhiculés par les divers moyens et canaux de communication, notamment par les femmes elles-mêmes, les hommes et par les masses média sur le sens du 8 mars et sur le contenu des activités menées, impactent négativement les perceptions et les comportements des différents acteurs.
C’est fort de ce constat que j’ai décidé de mener la réflexion sur la thématique afin d’une part de situer les fondements historiques de l’institution et de la commémoration de cette journée, et d’autre part, d’approfondir la recherche à travers des enquêtes sur le terrain pour mieux cerner la question dans le contexte spécifique du Burkina Faso. Les résultats de mes recherches sont indiqués dans le livre.
L’œuvre est structurée en cinq (05) chapitres :
- Chapitre 1 : Le 08 mars et la promotion de la femme ;
- Chapitre 2 : Le 08 mars dans le contexte du Burkina Faso ;
- Chapitre 3 : Les acquis de la commémoration de la journée internationale des femmes ;
- Chapitre 04 : Les opinions des personnes enquêtées sur la journée du 08 mars ;
- Chapitre 05 : Les tendances et perspectives de promotion de la femme à travers la commémoration de la journée du 08 mars.
En novembre 2023, vous avez dédicacé l’essai « Violences faites aux femmes et aux filles au Burkina Faso : réalités et stratégies de lutte ». Depuis la sortie de ce livre, qu’est-ce qui a changé ?
En effet, le 25 novembre 2025, j’ai dédicacé un ouvrage intitulé « Violences faites aux femmes et aux filles au Burkina Faso : réalités et stratégies de lutte ». Des changements ont été opérées depuis la sortie du livre, même si des poches de résistance demeurent.
Nous constatons l’engouement des différents acteurs, femmes et hommes, publics et privés, partenaires nationaux, techniques et financiers, autour du livre, car ayant perçu son importance et sa pertinence dans la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles.
Les acteurs utilisent cet ouvrage comme guide pédagogique dans leurs interventions sur le terrain.
L’ouvrage a fait un boom au plan national en matière de lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles, car nous constatons de plus en plus, l’engagement des acteurs, des OSC et ONG, des partenaires techniques et financiers dans la lutte contre les VBG et la prise en compte du genre dans leurs actions.
Nous constatons également la promotion de la masculinité positive, à travers l’intervention des hommes modèles qui s’illustrent au quotidien pour promouvoir les droits des femmes et filles.
Des actions d’information, de formation et de sensibilisation se multiplient au profit des populations à la base pour dire non aux violences faites aux femmes et aux filles.
Il y a un éveil de conscience des populations, depuis le niveau central jusqu’à la base, quant à l’implication des femmes et des filles dans les actions de développement.
Les femmes prennent de plus en plus, conscience du rôle de leaders qu’elles doivent incarner et de leur rôle dans la gouvernance des affaires publiques.
Lire aussi : Soutenance : Noangma Léonie Koudougou plaide pour une réforme de la médiation professionnelle
Ne serait-ce qu’une seule de vos recommandations, a-t-elle été prise en compte ?
Oui, nos recommandations sont prises en compte au quotidien par les acteurs, notamment les recommandations sur la sensibilisation des populations, sur la problématique des violences faites aux femmes et aux filles. Des sensibilisations sont faites par tous les acteurs au plan national et local. Il y a aussi la prise en charge des victimes. Cette prise en charge est faite par les services étatiques et non-étatiques.
Écrire a-t-il apporté une plus-value à votre carrière ?
Écrire m’a apporté une plus-value dans ma carrière professionnelle. En effet, la publication de mes ouvrages a suscité un vif intérêt, attirant l’attention des administrations publiques et privées, des organisations de la société civile, des femmes leaders, des partenaires techniques et financiers, tant au Burkina Faso qu’au plan international et régional.
Ces ouvrages m’ont permis de me hisser au rang des femmes leaders de mon pays, à tel point que ma biographie et mes ouvrages sont désormais, cités dans des documents et lors des rencontres stratégiques.
A titre d’exemple, cette reconnaissance m’a permis de participer à des panels nationaux et régionaux de haut niveau en tant que panéliste.
Ces ouvrages m’ont également permis de prendre part, en tant que femme leader, au dîner gala des femmes leaders, organisé par les femmes ambassadrices et consuls résidant au Burkina Faso.
Ces ouvrages constituent un véritable tremplin et une fierté pour moi. J’ai également compris que le travail, lorsqu’il est bien fait, est une source de récompense incommensurable.
Qu’est-ce que les hommes devraient-ils faire pour améliorer considérablement, la vie de la femme au Burkina ?
Pour améliorer considérablement la vie de la femme au Burkina Faso, les hommes devraient accompagner les femmes dans la promotion de leurs droits fondamentaux. Tout comme nous dit l’adage « Derrière un grand homme se cache une grande dame », je dirai de même que « Derrière une grande dame se cache un grand homme ». Aucun développement humain n’est possible et durable sans la contribution des hommes et des femmes, et pour cela, personne ne doit rester en marge.

Pourquoi avoir choisi de parler de la médiation dans votre soutenance ?
La médiation est un mode alternatif et pacifique de résolution des conflits. Opter pour la médiation professionnelle comme thème de mémoire, c’est choisir d’investir dans un processus libre et volontaire, qui fait appel à l’écoute active et à la compréhension mutuelle des parties en conflit. Et cela, pour une solution libre et acceptée de tous. Cette solution est garante d’une consolidation de la paix et de la cohésion sociale.
Nous avons choisi de travailler sur la médiation professionnelle parce que ce mode de résolution des conflits, qui est un mode parmi tant d’autres, est peu développé et est au stade embryonnaire dans la pratique et les habitudes des Burkinabè. Elle est utilisée pour régler des conflits à tous les niveaux. Mais son accessibilité et sa pratique ne sont pas encore assurées, cette pratique étant d’obédience traditionnelle, caractérisée par le recours aux mécanismes traditionnels de résolution des conflits qui, eux aussi, présentent des limitent.
Quelles sont les conclusions auxquelles vous êtes parvenues ?
Nous avons fait une analyse de la pratique de la médiation en termes de droit comparé. Des résultats de nos recherches, il est ressorti que la médiation professionnelle est un métier structuré, encadré par des normes et exercé par des médiateurs professionnels, qui font de la médiation, leur métier. Elle est pratiquée sous différentes formes au Burkina Faso et ailleurs.
La médiation présente des avantages, notamment la maîtrise du processus et de l’accord de médiation par les parties, la recherche des enjeux sous-jacents du conflit, la préservation des relations sociales entre les parties.
Cependant, la pratique de la médiation au Burkina Faso connaît des difficultés liées notamment, aux cadres juridique, judiciaire, institutionnel et social.
Au regard de ces difficultés, nous avons proposé des mesures pour un meilleur ancrage de la médiation au Burkina Faso.
En tant qu’outil de prévention, de gestion et de résolution des conflits, la médiation mérite donc; d’être repensée surtout, dans un contexte marqué par des conflits multiples et multiformes. Ces mesures permettront de promouvoir la médiation en tant que mode de résolution amiable des conflits aux côtés de la justice classique et des autres « Mode Alternatif de Résolution des Conflits (MARC).
Entretien réalisé par Françoise Tougry /Queenmafa







