« La professionnelle de l’image face aux défis du numérique », c’est sous ce thème qu’est célébrée la 5e édition des Journées cinématographiques de la femme africaine de l’image (JCFA) du 02 au 7 mars 2018. A cet effet, un panel a été organisé ce vendredi 02 mars sur le thème de ladite édition.
C’est le film ’’Afro digital’’ du Congolais Balufu Bakupa Kanyinda qui a planté le décor de ce panel. Un film de 52 minutes, réalisé en 2001. Voici un long voyage qui commence en Europe, qui passe par Goré et qui traverse une dizaine de pays d’Afrique dont Ouagadougou pour finir dans la cellule ou était Nelson Mandela. Un long voyage effectué pour plusieurs raisons à la recherche des promesses du numérique.
C’est alors une conversation autour de l’utilisation du numérique par les femmes, qui s’illustrent évidemment dans le cinéma africain, dont il a été question à la suite de cette projection. Deux réalisateurs aux expériences différentes en cinéma sont ces panélistes: Balufu Bakupa Kanyinda qui connaît l’analogique et le numérique et Mamounata Nikiema qui n’a fait chemin qu’avec le numérique sous la modération de Claire Diao, journaliste et critique en cinéma.
Le numérique est une réalité dans le cinéma aujourd’hui. Une conversation plutôt qu’un débat comme l’a souhaité le panéliste Balufu, qui démontre que l’avènement du numérique est salutaire, en ce sens qu’il rend le travail plus facile et plus rapide.

La 2e panéliste, quant à elle, Mamounata Nikiema, réalisatrice productrice, directrice de la société de production Pilumpiku, trouve aussi intéressant le travail avec le numérique. « C’est grâce au numérique que j’ai fait mes premiers pas dans le cinéma ». A en croire Mamounata, le numérique est une chance pour les femmes, parce qu’il leur permet d’organiser leur vie professionnelle et sociale plus tranquilement et sans pression. Elle poursuit en affirmant que grâce à internet, on peut se former à distance, converser avec sa productrice qui est dans un autre pays, et internet offre plus de possibilités (envoyer les films plus facilement lors des festivals, les télécharger en ligne, et réduit le temps d’envoi et les coûts).

Des défis à relever
Si aujourd’hui, le numérique stresse moins des réalisateurs à comparer avec l’analogique qui impliquait le transport de pellicules et beaucoup plus de calculs et de mathématiques, force est de reconnaître qu’il y a des difficultés auxquelles il faut faire face avec l’avènement de ce nouvel outil de travail.
Le cinéma est une science qui mérite de la créativité et de la qualité dira le réalisateur Balufu. Malheureusement avec le numérique, il y a pleins d’amateurs qui se réclament être des réalisateurs. Fait déploré par le congolais, au point de souligner qu’il ne faut pas « confondre vidéo et cinéma » parce que le cinéma est une école qui a des règles et des pratiques qui lui sont propres. A entendre Balufu, l’Afrique « entre à peine dans le numérique parce qu’on a pris du retard ». Le passage de l’analogique au numérique, poursuit-il ne devrait pas enlever aux réalisateurs leur créativité qui a toujours été une force dans la production cinématographique africaine.
Une autre difficulté que va relever la réalisatrice burkinabè Nikiema, est la question de l’énergie et la difficulté d’accès à internet qui conditionnent aussi l’utilisation du numérique.
Du côté des participantes entre autres l’actrice ivoirienne Naky Sy Savané et Gorgette Paré, le thème choisi a été bien pensé.
« Le numérique profite grandement à nous les femmes. On n’a pas besoin de se gratter la tête pour avoir le transport ou pour pouvoir faire certaines choses. On peut communiquer à travers les mails, Facebook etc. Il faut que le cinéma entre dans notre patrimoine. C’est dans le passé qu’on crée l’avenir», foi de Naky Sy Savané.

« Le numérique relève d’une importance capitale pour un cinéma, même si au début, certains l’ont catégoriquement refusé. C’est vrai qu’aujourd’hui il y a des gens qui en abusent, car l’objectif est se servir du numérique pour se former à l’outillage et faire du bon cinéma. Il faut aussi voir comment corriger les inconvénients du numérique, amener les professionnels à connaître l’outil pour l’exploiter véritablement à fond. La connaissance manque souvent aux films qu’on projette», a décrié Gorgette Paré.

Des débats enrichissants, avec des conversations qui touchent à la prospérité du cinéma africain à l’ère du numérique et qui invitent les acteurs en la matière, à une utilisation plus professionnelle de ce nouvel outil de travail.
Assétou Maïga