Devant un jury attentif, Noangma Léonie Ouangrawa Koudougou a défendu avec brio, ce 24 octobre 2025, son mémoire de master consacré à un sujet aussi sensible qu’actuel qu’est « La médiation professionnelle : analyse des pratiques et perspectives de réforme au Burkina Faso ». À l’issue de sa présentation, la jeune impétrante a obtenu la note de 17/20. Le jury salue un travail rigoureux et porteur d’avenir pour la justice burkinabè.
« Là où il y a la société, il y a le droit… Mais aussi des conflits, et donc, le besoin d’apaisement », a introduit Léonie devant le jury. Dans un contexte marqué par la montée des tensions communautaires et sociales, la médiation apparaît selon elle comme un outil essentiel de prévention et de gestion pacifique des différends.
Son mémoire explore le rôle, les pratiques et les limites actuelles de la médiation professionnelle au Burkina Faso, un domaine encore peu structuré malgré un cadre juridique existant.

« La médiation est pratiquée dans notre pays, mais souvent sous une forme traditionnelle portée par les chefs coutumiers, les leaders religieux ou communautaires. Il faut désormais, professionnaliser cette pratique pour la rendre plus efficace et reconnue », a-t-elle expliqué lors de son entretien après la soutenance.
Une étude fouillée entre droit comparé et terrain burkinabè
Léonie Koudougou a adopté une méthodologie combinant recherche documentaire et enquête qualitative auprès de 13 personnes ressources dont des experts en médiation. Son travail met en lumière, la coexistence de deux formes de médiation. Celle conventionnelle, à l’initiative des parties et judiciaire et celle ordonnée par un juge.
Cependant, la recherche révèle de nombreuses insuffisance : absence de statut juridique clair pour les médiateurs, méconnaissance de la pratique par le grand public et manque de formations spécialisées.
« Il n’y a pas encore de précision sur le profil et les qualifications des médiateurs au Burkina Faso. Il faut créer une véritable école professionnelle de formation et définir un cadre légal solide », a plaidé la jeune dame.

Dans ses propositions, Léonie Koudougou recommande une refonte législative et institutionnelle pour encadrer la médiation professionnelle. Elle appelle notamment à l’adoption de textes définissant les critères de qualification et les responsabilités des médiateurs, la mise en place d’unités de médiation dans les tribunaux, la sensibilisation des populations et des acteurs judiciaires à cette culture du règlement à l’amiable et la création d’une École nationale de médiation professionnelle.
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Une passion née du terrain
Si Léonie parle avec autant de conviction, c’est que la médiation, elle la pratique déjà, de manière informelle dans son entourage et sa communauté.
« Cette formation m’a permis de mieux comprendre les principes et l’éthique de la médiation professionnelle. J’ambitionne désormais, de devenir médiatrice reconnue pour contribuer à la prévention et à la résolution des conflits dans mon pays », a-t-elle confié.
Son directeur de mémoire, Dr Paul Kiemdé, ne cache pas sa satisfaction.

« C’est un travail de bonne facture, solide et prometteur. Ce genre de recherche est précieux, car il ouvre la voie à une meilleure formation des acteurs de la paix », a-t-il déclaré. Aussi, a-t-il noté, le thème choisi par l’impétrante est pertinent car il porte sur un problème qui n’est plus courant, mais qui émerge.
En bref, le thème sur les conflits est un sujet d’actualité qui ne donne pas lieu à des formations spécifiques si bien qu’on avait jusqu’à présent, des arbitres, des conciliateurs qui peuvent être compétents à force de pratiquer. Cependant, on gagnerait à recevoir des formations car cela permet d’éviter les erreurs que l’on peut rencontrer ou de les limiter.
Au-delà de l’excellence académique, le mémoire de Noangma Léonie Koudougou s’inscrit dans une démarche citoyenne. Celle de promouvoir une justice plus humaine, plus accessible et plus efficace. Dans un pays où les mécanismes traditionnels et modernes coexistent encore difficilement, son appel à la professionnalisation de la médiation résonne comme une invitation à repenser la justice burkinabè sous le signe du dialogue.
« La médiation n’est pas seulement, un mode de règlement des conflits. C’est une culture de paix à construire », a-t-elle conclu, avec conviction.
Françoise Tougry
Fabrice Sandwidi





