«Je suis fou amoureux… »

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Difficile de rencontrer l’homme tant son agenda est chargé. Après plusieurs tentatives infructueuses, Gérard Koala nous reçoit enfin dans une villa en plein cœur de Ouagadougou.  C’est dans cette ambiance, sans langue de bois que le coordonnateur du FONY parle de son amour pour sa patrie, le Burkina Faso !

Qui est Gérard Koala ?      

 Je suis un jeune burkinabè fou amoureux de mon pays et de sa culture. Je suis par ailleurs le coordinateur du Festival Ouaga New York(FONY) qui est un festival de promotion de la culture burkinabè à l’international.

En tant qu’homme de culture, que faites vous concrètement pour la promotion de la culture burkinabè aux USA ?

Mon travail consiste à donner de la visibilité à tous les différents acteurs de la culture burkinabè et les principaux acteurs sont les artistes de toutes les filières que nous pensons qu’ils ont un talent méritant d’être connu au-delà de nos frontières.

Aujourd’hui, il n’y a plus de doute que le Burkina Faso regorge de beaucoup talents sur le plan artistique, on se pose alors la question pourquoi ne sont-t-ils pas connus au-delà de nos frontières ? Pourquoi ne sont-t-ils pas sollicités à certaines grandes manifestations internationales ? Pourquoi n’ont-ils pas l’opportunité de s’exprimer artistiquement comme les artistes d’autres pays.

Alors nous avons pensé que c’était un devoir pour nous de créer cette opportunité de visibilité pour nos artistes. Chose que nous avons réussi à faire à travers le FONY qui dure déjà trois ans. Nous donnons la possibilité à des artistes et des hommes de culture burkinabè de se frotter à d’autres réalités et de faire des rencontres sur le plan culturel.

Vous résidez à l’étranger depuis des décennies. A part la culture, dans quel autre domaine peut-on rencontrer Gérard Koala ?

 Je suis aux USA depuis plus de 10 ans. Je suis avant tout une personne sur le plan professionnel qui mène plusieurs activités. La plus connue, c’est celle de disc/Joker(DJ) qui consiste à animer des soirées, des mariages, des anniversaires. Je fais des animations pour des communautés africaines, américaines. En plus d’être DJ, je suis conducteur de biens et de personnes. Je suis enfin un agent des services sociaux où j’administre des médicaments aux personnes ayant des troubles mentaux. Je les assiste avec des techniques qui les permettent de pourvoir fonctionner comme des personnes normales…

N’est-ce pas un peu trop pour une personne ?

 C’est peu, je dirai même. Parce qu’aux USA pour bien vivre, il faut faire assez de choses. C’est l’occasion de dire à ceux qui pensent que là bas on peut vivre comme au Burkina pour s’en sortir, ils se trompent. Au Burkina, avec un bon métier, on arrive à joindre les deux bouts, à vivre une vie décente mais aux USA c’est rare de voir quelqu’un vivre d’un seul métier.

DJ Kadhafi, c’est cela votre pseudonyme. D’où vous vient-t-elle cette appellation ?

 Rires… Je suis avant tout une personne qui aime tous les héros africains de part ce qu’ils ont fait. Parmi ces héros, j’aurais pu m’appeler DJ Kwamé N’Nkrumah ou DJ Thomas Sankara. C’est dans cette vision que j’ai opté de me faire appeler Kadhafi. Pourquoi ce nom ? Parce que le guide libyen était une personnalité pour moi de très spéciale de part mes principes et ma vision des choses. De part de cette appellation, j’ai juste reflété la vision du guide libyen qui croyait en une Afrique unie comme j’y crois fortement.

Souleymane Porgo, un ressortissant burkinabè bastonné et laissé pour mort à New York, il y’a peine quelques mois. Ce n’est d’ailleurs  pas la première fois que les burkinabè sont confrontés à une telle situation. Comment expliquez-vous cette situation de violence ?

Je dirai très heureusement que ce n’est pas fréquent les agressions de nos compatriotes là-bas. Souleymane n’est pas la première personne à être agressée même moi je l’ai été verbalement dès mes premiers jours à New York. Agressé au point de perdre sa vie, je peux dire que le cas de Porgo est très alarmant. On se souvient aussi de la mort d’un de nos compatriotes du nom de Zongo tué par des policiers.

Nous condamnons  tous ces actes barbares non pas parce que cela se passe à New York mais parce que ce sont des êtres humains qui sont torturés ainsi.  Ces types d’agressions ont pigeon sur rue dans toutes les villes même africaines. Quand c’est un des nôtres alors nous sortons toute notre énergie pour montrer que nous sommes contre ces actes de violence et réclamons justice.

Au Burkina Faso également, l’on constate en ces périodes la montée en puissance de l’incivisme. Comment interprétez-vous cela surtout au pays des hommes intègres ?

J’ai été choqué lorsque j’ai vu les images de ce lynchage. Moi qui pleurais la situation de Souleymane Porgo et Farid bastonnés aux USA. Arrivé chez moi au Burkina Faso, je vois un acte similaire où c’est une femme innocente humiliée qui risquait sa vie n’eut été l’intervention des forces de l’ordre. C’est grave. Le Burkina a toujours a été connu comme un havre de paix, là où les morales sont très respectées.

Aujourd’hui ce sont des hommes qui déshabillaient à volonté une femme pour l’humilier, je dis c’est grave. Nous sommes repartis à des années lumières, loin des civilisations, pour se retrouver dans une période d’antiquité. Et c’est à Ouagadougou que ces actions se sont passées, je dis c’est grave.

L’Etat devrait prendre ses responsabilités et punir sévèrement toute personne qui serait prise en situation d’acte d’incivisme. S’il faut passer par la manière forte et même condamner les fautifs à prison à vie. Rien ne justifie ces comportements cherchant à se rendre justice soi même quand on sait notre société est régulée par des lois.

Ces gens qui ont humilié cette femme devraient avoir honte. A travers leur acte, c’est non seulement leur mère, leur sœur, leur fille, leur père qu’ils ont humilié. Cette humiliation, Dieu Seul sait si la victime pourra l’effacer de sa mémoire.

Avec la nouvelle politique Américaine sur l’immigration, les Africains en général et particulièrement les burkinabè ne seront-t-ils pas menacés d’expulsion des USA ?

Tous les immigrants venant du monde entier vont être menacés des nouvelles lois de l’immigration que notre président actuel veut mettre en place. Si malheureusement, il arrive  à ses fins c’est-à-dire empêcher que les gens viennent aux USA, ce serait dommage. L’Amérique doit sa grandeur dans sa diversité. C’est parce que le monde entier se retrouve aux USA que l’Amérique est une grande puissance. C’est parce que l’Amérique s’ouvre aux restes du monde qu’elle apprend des autres. C’est cela sa force. Je pense humblement que c’est une erreur de la part de notre président de penser que fermer les portes du pays aux restes du monde serait sécurisé l’Amérique.

Personnellement  cette loi ne m’inquiète pas. Je suis citoyen  Américain ainsi que ma famille. Cependant, j’ai des amis, des collègues qui sont des immigrants qui travaillent honnêtement à gagner tout en payant les taxes qui contribuent toujours au développement des USA.

Alors demander à ces personnes de quitter le pays je crois que c’est une erreur. Ce serait impensable de vider l’Amérique de ses 11 millions de sans papiers et de fonctionner normalement.

Ils sont nombreux ces Africains qui meurent aux larges des côtes Européennes en quête de l’Eldorado. Pour vous qui résidez aux États-Unis, l’occident est-il un eldorado ?

Non. Pas du tout. L’eldorado c’est l’Afrique. C’est un continent vierge où tout est à développer. Il suffit de se donner la main pour développer des sociétés, des produits consommables par les Africains. Ceux qui ignorent cela prennent le risque jusqu’au péril leur vie pour vouloir aller en Europe en voulant traverser le désert, la mer.

Pensez vous que c’est humain pour quelqu’un de faire plus de trois métiers, travailler comme un esclave juste pour gagner sa vie. Avant l’on nous forçait à travailler et on nous appelait des esclaves. Aujourd’hui on se bat pour y aller afin d’être traité comme des esclaves. Est-ce honorable pour un être humain ?

Regrettez-vous d’y  être allé?

Je réponds non. Mais croyez-moi aujourd’hui si on me ramène à 13 ans en arrière avec tous les avantages que j’avais et toutes les activités que je menais, je vous le dis j’allais rester en Afrique et  non aller en Aventure.

Que pensez-vous de l’avènement des mouvements d’auto-défense appelés kogl-wéogo ?

C’est quelque chose que nous observons depuis les États-Unis. Personnellement, qu’il ait des groupes d’auto-défense, je dirai que ce n’est pas une mauvaise chose en soi mais lorsque ces groupes s’adonnent à des actes de violence à l’endroit des citoyens à vouloir les humilier ou les déposséder de leurs biens, là je ne suis pas d’accord. Les Kogl-Wéogo ne sauront en aucun cas remplacer les forces de l’ordre formées pour la sécurité des biens et des personnes.

Nous voyons les exactions commises par certains Kogl-wéogo. Cela n’honore pas leur groupe. Si les autorités leur donne le pouvoir d’exister dans certaines localités où les forces de l’ordre n’y sont pas, cela est en leur honneur. De ce fait ils doivent donner leur exemple. Il faut que les autorités retirent les armes que détiennent ces Kogl-wéogo et leur laisser la possibilité d’arrêter les délinquances et autres brigands sans vouloir se faire justice eux -même.

Quel regard porte-on sur le Burkina Faso depuis les États-Unis ?

Nous voyons le Burkina Faso comme le plus beau pays au monde. D’aucun nous diront que nous sommes rêveurs. Oui, nous rêvons de voir que tout ce que nous pensons de ce pays devienne une réalité. Il faut montrer aux gens qu’au Burkina Faso, il y a du bon, du beau et du fort.

Quelle personnalité féminine burkinabè  appréciez-vous ?

Sans réfléchir, je vous dirai que c’est ma mère. Elle est une personnalité pour moi car c’est elle qui m’a mis au monde. Mais au-delà de cela, c’est une femme venue d’un tout petit village et n’ayant pas eu la chance de fréquenter l’école et qui a accepté toutes les difficultés de la vie. Elle a tout fait et nous a appris être des hommes dans la vie. Pour moi il n’y a pas de personnalité plus grande que cette femme qu’est ma mère.

                                                                       Entretien réalisé par Issa KARAMBIRI

 

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