L’Assemblée législative de transition a adopté, ce mardi, à l’unanimité des 71 députés présents, la loi portant réorganisation agraire et foncière (RAF). Composée de 214 articles, cette nouvelle législation introduit de profondes réformes dans la gestion du foncier national au Burkina Faso, avec pour ambition de replacer l’État au cœur du système foncier et de corriger les insuffisances de la loi de 2012.
Dès l’entame de la session plénière, l’objectif affiché est clair : améliorer durablement la gouvernance foncière, garantir un accès équitable à la terre et favoriser le développement agricole du Burkina Faso.
L’État, unique propriétaire de la terre
La principale innovation de cette loi réside dans la propriété pleine et entière de l’État sur l’ensemble du domaine foncier national. Désormais, toute la terre du Burkina Faso appartient à l’État, qui peut en déléguer la gestion à des collectivités territoriales, en fonction des besoins locaux et des réalités socio-économiques.
Ladite disposition marque un retour à une vision centralisée du foncier, rappelant la philosophie de la première RAF de 1984, tout en intégrant les exigences actuelles de gouvernance et de développement durable.
Une seconde innovation est la reconnaissance des droits coutumiers et nouveaux baux agricoles. En effet, la nouvelle loi introduit également une reconnaissance officielle des droits coutumiers à travers la délivrance d’attestations de possession foncière rurale. Cette mesure vise à sécuriser les exploitants traditionnels tout en réduisant les conflits liés à la propriété des terres rurales.
Outre cela, l’instauration de baux de longue durée, allant de 18 à 99 ans, pour les activités agricoles. Ces contrats offriront une plus grande stabilité aux exploitants sans leur transférer la propriété du sol.
En revanche, la loi interdit désormais aux étrangers d’obtenir un titre de propriété sur les terres rurales, limitant leur accès à la location ou aux baux agricoles.
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Expropriations d’urgence et abrogation des anciennes lois
La loi sur les procédures d’expropriation est abrogée. Ses dispositions sont intégrées à la nouvelle RAF, avec des ajustements notables. L’une des nouveautés est la possibilité d’expropriations d’urgence par l’État, notamment pour la mise en œuvre de projets stratégiques.

« Certaines initiatives d’intérêt national nécessitent une exécution rapide. Les procédures ordinaires d’expropriation étaient souvent trop longues et pouvaient compromettre l’efficacité de ces projets », a expliqué le ministre de l’Économie et des Finances, Dr Aboubakar Nacanabo.
Selon le ministre, cette réforme fait suite à un diagnostic réalisé en 2021 sur la précédente loi RAF de 2012. Ce rapport avait révélé plusieurs insuffisances. Une faible centralité de l’État dans la gestion foncière, une augmentation des cas d’accaparement de terres et des difficultés à mobiliser des espaces pour les projets agricoles ou économiques.
« La nouvelle RAF vient corriger ces failles et repositionner l’État comme garant de l’équité et de la transparence dans la gestion du domaine foncier national », a souligné Dr Nacanabo.
Avec l’adoption des 214 articles de la nouvelle RAF, la dernière étape est la finalisation des textes d’application afin d’assurer une mise en œuvre effective de la réforme.
Fabrice Sandwidi